Musées et galeries d’art par dizaines, festivals pointus, quartiers métamorphosés, tours résidentielles et hôtels de luxe… A Miami, tous les nouveaux projets associent le meilleur de l’art, de l’architecture et du design.
« Miami est devenue une capitale mondiale de la créativité au cours des deux dernières décennies et Art Basel a clairement servi de catalyseur ». Le promoteur immobilier Craig Robins sait de quoi il parle, lui qui a créé en 2005 Design Miami, l’un des événements satellites d’Art Basel. « J’aime le fait que Design Miami soit né ici, et pas à New York, Londres ou Paris, ajoute-t-il. Cela prouve le potentiel créatif de cette ville, jeune certes, mais en plein essor. » Les grands musées et institutions publiques (PAMM, BASS Museum of Art, Moca…), les fondations familiales privées (Margulies, Cisneros-Fontanals, Rubell, de la Cruz…) et d’innombrables galeries d’art ont également posé des bases solides et pérennes. Résultat : « l’art contemporain n’a jamais été aussi présent à Miami, s’enthousiasme Diana Nawi, conservatrice du PAMM (Pérez Art Museum Miami). Il en est à un moment-clé de son évolution avec des lieux institutionnels ou privés qui apportent des idées fraîches et font émerger de nouveaux artistes. » Le Faena Forum, le dernier-né des centres d’art, qui occupe un spectaculaire bâtiment de 4 700 m2 dessiné par Rem Koolhaas au cœur du Faena District (sur le modèle de celui de Buenos Aires), est bien sûr de ceux-là et ajoute sa pierre à l’édifice.
A l’instar de l’art contemporain, le design rassemble aussi les foules, et pas seulement lors de Design Miami : Maison & Objet Americas, la version américaine du salon français de la décoration, a été lancé en 2015 et l’ICFF (International Contemporary Furniture Fair), le salon du mobilier contemporain qui se tient à New York pendant la Design Week, a décliné son concept à Miami. « Par nécessité, pour conserver son attractivité touristique, Miami se doit de toujours générer des nouveaux projets qui appellent au rêve. Être à la pointe, devancer les tendances, c’est une question de survie, ici », explique l’architecte Allan Shulman (qui a notamment réalisé la Rubell Family Collection et l’hôtel Soho Beach House). Sa consœur Rachel Cardello, à la tête du cabinet d’architecture Stantec à Miami (le Shelborne Hotel et l’Aloft South Beach Hotel, c’est lui) se félicite d’ailleurs de voir « un phénomène assez récent : l’intervention de starchitectes comme Frank Gehry, Rem Koolhaas, la regrettée Zaha Hadid, Herzog & de Meuron, Renzo Piano ou Bjarke Ingels, dans des projets résidentiels ou commerciaux ».
Parmi les derniers chantiers en date, les résidences Ritz-Carlton de Piero Lissoni et Echo Brickell de Carlos Ott, le Faena District Miami Beach de Rem Koolhaas et Sir Norman Foster (2017), la renaissance du Surf Club sous enseigne Four Seasons menée par Richard Meier et Joseph Dirand (début 2017) et la tour One Thousand Museum, œuvre posthume de Zaha Hadid (2018) toute en courbes, entre ciel et océan.
Promoteur immobilier féru d’art, Craig Robins a ressuscité le quartier Art déco de South Beach dans les années 1980 avant de créer la foire Design Miami, puis de concevoir le Design District. Ce vaste mall à ciel ouvert réunit les grandes marques de luxe internationales dans une centaine de showrooms à l’architecture spectaculaire, mais aussi des œuvres d’art exceptionnelles (de Buckminster Fuller, Xavier Veilhan, Mark Quinn, Fernando Botero, Konstantin Grcic…), ainsi que des lieux dédiés à l’art comme la Collection de la Cruz ou l’Institute Contemporary Art qui a intégré un espace réalisé par les espagnols Aranguren & Gallegos Arquitectos.
Tout près de là, le quartier de Wynwood est sorti de l’abandon grâce à Tony Goldman, autre promoteur visionnaire, qui a redonné vie à des entrepôts désaffectés (des dizaines de galeries d’art notamment y sont installées) et monté de toutes pièces une immense galerie de street art à ciel ouvert avec les stars de la discipline (Shepard Fairey, Retna, Maya Hayuk…) : une concentration unique au monde et un régal pour les photographes et les instagrameurs.
Voyant d’un mauvais œil le quartier se gentrifier et les prix des loyers flamber, des galeristes de Wynwood ont commencé à migrer vers le Nord, en direction de Little Haiti. Certains ont investi le MiMo district (un acronyme pour Miami Modern Architecture). D’autres défrichent de nouveaux territoires du côté de Allapattah ou plus loin, vers Hialeah. Quelques-uns ont choisi Miami Ironside, un incubateur composé d’ateliers d’artistes, de studios d’architectes, de showrooms design et d’espaces de co-working. Un lieu alternatif et coquet à la fois, calme et studieux la semaine, mais très animé le week-end quand les familles de North Miami Beach viennent se balader jusqu’ici, manger une pizza… ou faire une partie de pétanque !
L’architecte Allan Shulman voit dans ces évolutions une chance pour la ville : « Miami vit actuellement une étape passionnante de son développement urbain. C’est un laboratoire de questions contemporaines : la montée du niveau de la mer, la durabilité, l’évolution de l’habitat, l’urbanisation, la conservation des bâtiments historiques. » A n’en pas douter, il faut toujours garder un œil sur ce qui se passe à Miami…
Photos : Greater Miami Convention & Visitors Bureau / Céline Baussay
Article reformaté pour le web – Parution initiale dans IDEAT, 2016.